Un nouveau "Bles" dans les collections du musée

Entré dans les collections du musée, en 2023, le Paysage montagneux avec scènes de la vie de saint Jean-Baptiste vient de passer entre les mains des équipes scientifiques de l'Irpa...

Paysage montagneux avec scènes de la vie de saint Jean-Baptiste (coll. PN, inv. 622).

En 2023, le musée avait enrichi ses collections avec une peinture attribuée à Henri Bles, issue d'une collection privée, acquise dans la maison de vente colonaise Van Ham Kunstauktionen.

Le sujet iconographique, les prédications de saint Jean-Baptiste, est très répandu dans l’œuvre de Bles. Comme souvent dans les tableaux de la fin du Moyen Âge, plusieurs scènes sont représentées. C’est ce qu’on appelle la narration continue. À l’avant-plan, un homme assis, portant la barbe, la tête entourée d’un nimbe, vêtu d’un manteau rouge, tient un livre de la main gauche et lève la main droite en signe de bénédiction. En face de lui, faisant office d’assistance, sont regroupés des animaux. Un ours, un cerf, une biche, un chat, un renard, un loup, un tigre, une licorne, des oiseaux, lézards et salamandres, un serpent et deux lapins semblent écouter avec intérêt. Dans le sous-bois, à gauche du grand tronc creux, on devine un homme debout, s’adressant à une foule de gens rassemblés autour de lui. À droite, se déroule une scène de baptême.

Au mois de septembre 2024, l’œuvre est partie pour études techniques et en histoire de l’art à l’Irpa. Les observations laboratoires ont permis de confirmer qu’il s’agit bien d’une peinture du XVIe siècle. Divers éléments matériels et stylistiques ont également permis son attribution aux œuvres composant le corpus d’Henri Bles.

La peinture présente plusieurs particularités fort intéressantes, également confirmées par l’Irpa. L’une réside dans l’altération du support. Elle a en effet subi une transposition comme l’indiquent plusieurs indices : le très bon état de conservation de la planche de chêne qui semble bien postérieure au XVIe siècle et l’incohérence entre les traces anciennes des joints des planches, visibles sur la couche picturale, et le panneau. L’autre particularité est l’amputation de la partie droite de l’œuvre. La peinture, avec ce grand arbre fendu occupant la moitié de la surface peinte et l’absence de sommet montagneux à l’horizon, a été amputée d’une trentaine de centimètres. Si l’on considère la Parabole du bon Samaritain, fort proche du Saint Jean-Baptiste dans l’agencement des éléments naturels du paysage, des personnages et du bestiaire, la partie droite (l’arbre fluet, planté sur une petite butte de grosses pierres et contourné par un chemin, meublant le ciel) s’ajusterait en effet parfaitement au Saint Jean-Baptiste, comme cela apparait très clairement ci-dessous. Cette substitution faite, la composition s’organiserait à nouveau selon un axe diagonal, qui est une caractéristique majeure de l’œuvre de Bles.

Schéma hypothétique de l'ensemble de l'oeuvre étudiée.

Comparaison avec le Paysage avec la Parabole du bon Samaritain (coll. FSAN, inv. 157) duquel l'oeuvre est très proche.

Suite aux analyses réalisées par l’Irpa, le tableau est parti dans l’atelier de la restauratrice Claire Dupuy, qui pourra notamment procéder à l'enlèvement des nombreux surpeints.